Sunday, January 5, 2020

Aux origines du Mask



The Mask - intégrale, vol. 1 (Delirium, 2019)
Scénario : John Arcudi / Dessin : Doug Mahnke

On pourrait comparer The Mask aux Tortues Ninja : là où la série animée produite de 1987 à 1996 mettant en scène les reptiles combattants plonge le comics original (plus sombre et plus violent) dans l'obscurité, le film de 1994 avec Jim Carrey occulte pas mal l'oeuvre originale, là encore un comics assez (voire carrément, en fait) sanglant.

Difficile de ne pas se laisser aller au jeu de la comparaison avec le film, surtout quand il s'agit un classique de son enfance. Et d'ailleurs, pour l'avoir revu assez récemment, il conserve tout son charme et son efficacité (mais peut-être qu'en avoir moins usé la VHS que d'autres films du même genre a joué en sa faveur).


 

Le concept global est le même : un individu, pas forcément un gros winner dans la vie, met la main sur un mystérieux masque qui le transforme en créature loufoque invulnérable lui permettant d'assouvir tous ses fantasmes. Première différence, au cours des deux histoires originales que rassemble cette première intégrale (publiées de 1991 à 1993, il s'agit donc des seuls numéros publiés avant la sortie du film), plusieurs propriétaires du masque défilent : un homme à la vie bien rangée, sa petite amie, le détective chargé de retrouver le criminel délirant, et enfin un gangster miteux. Les différents porteurs ne modifient qu'à peine la personnalité du "Big Head", qui est bien le protagoniste central de l'ensemble, même si son unique ambition semble être de semer le chaos.

Seconde différence : si le film avec Jim Carrey comporte bien quelques scènes de violence absurde qui passerait peut-être moins bien aujourd'hui, l'ensemble a été plutôt édulcoré. Ici, toutes les histoires tournent autour de pugilats avec la pègre, ce qui offre son lot de mafieux offerts en chair à canon et mitraillés allègrement dans de grandes gerbes d'hémoglobine. Mais les représentants de loi y passent aussi...


En baissant le niveau de violence, le film a également monté d'un cran le délire loufoque de l'ensemble, reposant sur le génie de Jim Carrey. Si le clown à la tête verte qui prend possession du corps des plus ou moins malheureux propriétaires du masque a bien une personnalité totalement exubérante, est capable de sortir des fusils d'assaut et autres masses d'armes de nulle part et de se déguiser en chevalier ou en cuistot juste pour soutenir un gag vaseux, le mitraillage en bonne et dûe forme prend toujours le pas sur les facéties.

Le dessin ne paie pas de mine au premier coup d'oeil, avec des compositions pas toujours incroyables et un léger manque de personnalité. Mais la relative sobriété des décors ne fait que mieux ressortir un personnage aussi haut en couleurs, et l'ensemble prend un charme assez désuet. Quant aux explosions de violence, elles sont rendues avec une brutalité assez frappante.

Bref, un comics bien sympathique avec ce vernis d'insolence typique du début de la décennie, peut-être moins délirant que le film, mais plus brut et impertinent.