Les Racines du Mal a certainement quelque chose de fascinant. Ce pavé
de 600 pages dans la collection Série Noire s'ouvre sur un premier
chapitre d'une centaine de pages décrivant la cavale meurtrière d'un
tueur en série convaincu d'être harcelé par des aliens-Nazis tuant au
hasard avec une violence débridée. Les trois chapitres restant décrivent
le parcours d'un scientifique équipé d'une neuromatrice, un ordinateur
super-puissant contenant une intelligence artificielle révolutionnaire.
Il s'intéresse d'abord au cas du tueur fou - nommé Andréas Schaltzmann
dont il tente de prouver l'innocence sur quelques meurtres qui lui ont
été faussement attribués dans la pagaille. Après le fiasco du procès,
les années passent, le livre se transforme en œuvre de science-fiction :
le chercheur participe à un projet scientifique très ambitieux. Mais il
finit par être rattrapé par son passé : les meurtres attribués à tort à
Schaltzmann seraient l’œuvre d'une secte millénariste commettant des
atrocités à travers l'Europe. Avec l'aide de sa neuromatrice qui n'est
pas sortie indemne de l'exploration de la psyché de Schaltzmann, il se
lance sur leur piste...
Il n'est pas difficile d'imaginer que pour un second roman publié
chez Série Noire, Dantec a peut-être eu la folie des grandeurs. Son
ambition démesurée a accouché d'un livre qu'il aurait peut-être fallu
couper en trois (peut-être à l'image du Cycle d'Ender d'Orson Scott
Card, aux trois volumes très différents), ou du moins élaguer largement.
Car si les deux enquêtes sont intéressante, parfois prenantes, elles
ne justifient pas vraiment les nombreuses pages de présentation des
victimes, ni de si longs et nombreux retournements de situation. Leur
connexion n'est finalement qu'assez ténue, et la neuromatrice n'apparait
bien souvent que comme un gadget farfelu qui lui non plus ne justifie
pas vraiment qu'on relie ainsi deux affaires meurtrières finalement
relativement distinctes.
Là où Dantec s'épanche assez largement sur la secte de tueur qui a
élaboré une compétition cruelle de meurtres de familles dans les
montagnes d'Europe, la folie de Schaltzmann semble assez vite balayée
dans un charabia christique Nazi cosmique incandescent plutôt brouillon.
Brouillon, c'est peut-être ce qui décrit le mieux Les Racines du Mal :
pas forcément dans le style, basique et parfois un peu agaçant avec ses
répétitions autosatisfaites (les sourires malicieux du narrateur, les
fractales informatiques et les feulements digitaux de la neuromatrice,
les "Boje Moi!" du personnage féminin bien peu développé, etc.), mais
plutôt dans la construction globale du récit et de son univers, qui ne
va que rarement au bout de ses thèmes ou de ses farfelues digressions
sci-fi.
On est ainsi censé accepter qu'en quatre ans (le bouquin démarre en
1995, année de sa sortie, et se termine en 1999), le paysage urbain de
la France change parfois du tout au tout, que les télécommunications on
fait un bond de géant - et surtout se sont largement démocratisées,
qu'il existe des hôtels entièrement robotisés, que l'intelligence
artificielle est quasiment arrivée à un niveau de conscience humaine,
etc. Pendant ce temps-là, l'éternelle cycle de la mode a fait une
nouvelle révolution et tout le monde arbore désormais des coupes de
cheveux "néo-seventies". Mouais.
On sent tout aussi bien que le charabia pseudo-scientifique qui
entoure toute l'utilisation de la neuromatrice n'est que bien peu
maîtrisé par son auteur, qui nous assène des centaines de fractales,
rhizomes et autres termes mystérieux pour justifier toute une
technologie qui ne change fondamentalement pas grand-chose au
déroulement du récit.
Le côté fourre-tout des Racines du Mal, son aspect hybride entre
polar et S-F, ses meurtres sordides rendent indubitablement son histoire
fascinante par moments, hélas trop courts et trop éloignés. La plupart
du temps, on se perd dans les méandres d'une enquête qui ne justifie que
rarement sa longueur.
RODENT
'90s pop culture trash
Wednesday, February 5, 2020
Sunday, January 5, 2020
Aux origines du Mask
The Mask - intégrale, vol. 1 (Delirium, 2019)
Scénario : John Arcudi / Dessin : Doug Mahnke
On pourrait comparer The Mask aux Tortues Ninja : là où la série animée produite de 1987 à 1996 mettant en scène les reptiles combattants plonge le comics original (plus sombre et plus violent) dans l'obscurité, le film de 1994 avec Jim Carrey occulte pas mal l'oeuvre originale, là encore un comics assez (voire carrément, en fait) sanglant.
Difficile de ne pas se laisser aller au jeu de la comparaison avec le film, surtout quand il s'agit un classique de son enfance. Et d'ailleurs, pour l'avoir revu assez récemment, il conserve tout son charme et son efficacité (mais peut-être qu'en avoir moins usé la VHS que d'autres films du même genre a joué en sa faveur).
Le concept global est le même : un individu, pas forcément un gros winner dans la vie, met la main sur un mystérieux masque qui le transforme en créature loufoque invulnérable lui permettant d'assouvir tous ses fantasmes. Première différence, au cours des deux histoires originales que rassemble cette première intégrale (publiées de 1991 à 1993, il s'agit donc des seuls numéros publiés avant la sortie du film), plusieurs propriétaires du masque défilent : un homme à la vie bien rangée, sa petite amie, le détective chargé de retrouver le criminel délirant, et enfin un gangster miteux. Les différents porteurs ne modifient qu'à peine la personnalité du "Big Head", qui est bien le protagoniste central de l'ensemble, même si son unique ambition semble être de semer le chaos.
Seconde différence : si le film avec Jim Carrey comporte bien quelques scènes de violence absurde qui passerait peut-être moins bien aujourd'hui, l'ensemble a été plutôt édulcoré. Ici, toutes les histoires tournent autour de pugilats avec la pègre, ce qui offre son lot de mafieux offerts en chair à canon et mitraillés allègrement dans de grandes gerbes d'hémoglobine. Mais les représentants de loi y passent aussi...
En baissant le niveau de violence, le film a également monté d'un cran le délire loufoque de l'ensemble, reposant sur le génie de Jim Carrey. Si le clown à la tête verte qui prend possession du corps des plus ou moins malheureux propriétaires du masque a bien une personnalité totalement exubérante, est capable de sortir des fusils d'assaut et autres masses d'armes de nulle part et de se déguiser en chevalier ou en cuistot juste pour soutenir un gag vaseux, le mitraillage en bonne et dûe forme prend toujours le pas sur les facéties.
Le dessin ne paie pas de mine au premier coup d'oeil, avec des compositions pas toujours incroyables et un léger manque de personnalité. Mais la relative sobriété des décors ne fait que mieux ressortir un personnage aussi haut en couleurs, et l'ensemble prend un charme assez désuet. Quant aux explosions de violence, elles sont rendues avec une brutalité assez frappante.
Bref, un comics bien sympathique avec ce vernis d'insolence typique du début de la décennie, peut-être moins délirant que le film, mais plus brut et impertinent.
Thursday, February 28, 2019
Earthbound : récit ini(tiati)que
Earthbound, ou Mother 2 au Japon, fait suite en 1994 à Mother, sorti uniquement dans l'archipel sur NES en 1989. Après sa sortie, le jeu est entré dans la légende. Bénéficiant aux États-Unis d'une campagne marketing assez particulière (des pubs dans les magazines clament "ce jeu pue" avec des pastilles malodorantes à gratter et des visuels dérangeants de ses monstres bizarroïdes) et étant vendu à un prix prohibitif puisqu'indissociable de son guide stratégique, le jeu ne trouve pas son public et les quantités d'invendus s'empilent. Les années suivantes, on peut le trouver bradé à des prix dérisoires, alors qu'une copie complète se négocie aujourd'hui à plus de 150$ en loose, à un peu moins de 700$ en boîte et à plus de 1000$ neuf ! Sans parler du traumatisme de l'annulation de Earthbound 64, ressuscité en 2006 sur Game Boy Advance en tant que Mother 3... et donc uniquement sorti au Japon. La récente SNES Mini Classic était quant à elle la première manière légale pour nous pauvres Européens de jouer à Earthbound, désormais souvent élu (ainsi que sa suite) comme meilleur jeu vidéo de tous les temps, ou du moins meilleur RPG de tous les temps, ou encore meilleur jeu de la SNES.
Et pourtant, Earthbound est un jeu des plus captivants et addictifs. Même pour quelqu'un comme moi qui adore la série, les Final Fantasy me gavent fréquemment par leurs combats interminables, leurs longueurs ou leurs changements de ton entre grandeur épique et humour kawaii à la noix. Mais là, sur un jeu au gameplay pourtant assez basique et similaire, impossible de lacher le pad. Pire, l'histoire est totalement débile, et pourtant on veut savoir où elle nous emmènera.
Première originalité intéressante, si Earthbound est bien un J-RPG à la Dragon Quest ou Final Fantasy, avec ses quatre personnages aux compétences différentes, ses points de vie, ses points de mana (ici, de Psi), ses combats au tour par tour, ses objets, ses inventaires, ses villes, ses magasins, ses monstres, ses bosses, ses dialogues, etc., Earthbound ne nous ressert pas une énième variation heroic-fantasy ni même SF. Non, Earthbound se déroule dans le monde réel, à notre époque. On n'est pas dans le réalisme pur et dur évidemment, mais l'univers est grosso modo proche de l'Amérique (ou bien du Japon ? difficile à dire tant la traduction anglaise est de qualité - oui, vous avez bien lu, une traduction de RPG de 1994 de qualité), avec ses petites bourgades, ses restaurants de pizzas et hamburgers, ses centres commerciaux, ses autoroutes, etc. La patte visuelle rappelle d'ailleurs étonamment Pokémon (jusqu'au héros à casquette et sac à dos), on peut se permettre d'imaginer que le best-seller de la Game Boy s'en est passablement inspiré.
Bon, assez rapidement on est emmené dans des contrées exotiques type Orient, dans le désert ou dans une vallée préhistorique, mais dans l'ensemble, l'aventure se déroule dans un monde terriblement familier. Et pourtant, l'histoire parvient à insuffler un véritable souffle à l'aventure (avec, je le rappelle, des enchaînements de péripéties totalement débiles et absurdes), à rendre ses personnages attachants et leurs destinées des plus touchantes. C'est en grande partie dû à l'excellente et éclectique bande-son bourrée de thèmes mémorables. On reste dans le style habituel de la bande-son de RPG, mais comme tout dans Earthbound, certains thèmes se détachent du lot par leur bizarrerie. Attendez donc d'être attaqué par un corbeau à lunette ou un autre monstre au design aléatoire sur un thème jazzy vaguement neurasthénique, le tout sur une visualisation psychédélique digne des lecteurs multimédia d'antan.
Les combats d'ailleurs, parlons-en. Comme dans Chrono Trigger, on voit directement les ennemis dans l'environnement : dès qu'ils repèrent le joueur, ils lui foncent dessus. Si ce dernier essaie de fuir et qu'il se fait quand même atrapper, l'ennemi attaque deux fois dès le début. Au contraire, si le joueur parvient à initier la confrontation par derrière ou sur le côté, c'est lui qui peut commencer avec une double attaque. Au fil du jeu, les ennemis les plus faibles fuiront le joueur, et les combats seront expédiés en une seconde quand l'issue ne fait aucun doute. Un bon moyen de rendre la progression plus dynamique, d'autant que les combats sont assez rapides puisqu'on ne voit pas ses personnages et que les animations sont des plus limitées. Autre trouvaille intéressante : les points de vie sont représentés par des compteurs défilants, ce qui fait que les dommages ne sont pas effectifs instantanément : si un personnage a beaucoup de PV et qu'il est mortellement touché, le temps que sa vie tombe à zéro, il a le temps de sortir une dernière attaque, ou de se soigner.
Si efficace que soit le système de combat, l'intérêt d'Earthbound se trouve autre part : découvrir quelles idioties les scénaristes ont imaginées pour faire progresser l'aventure. Ici, il faut donner de l'argent à un groupe de musique réduit en esclavage par le propriétaire d'une salle de concert, et utiliser leur camion de tournée pour traverser un tunnel rempli de fantômes qui fuiront alors la musique joyeuse, là où le joueur esseulé faisait demi-tour, terrifié. Ici, il faut emprunter à la bibliothèque un livre expliquant comment surmonter la timidité pour l'offrir à une tribu étrange pour pouvoir parler à son membre le plus fort pour qu'il soulève un rocher et donner accès à une vallée souterraine remplie de dinosaures. Pas d'inquiétude, le joueur ne doit pas se débrouiller tout seul pour trouver tout ça, il est largement guidé dans les dialogues. De toute façon, puisque le guide stratégique était vendu avec le jeu, il n'y a aucune honte à s'y référer (on peut trouver des scans sur Internet, par exemple ici).
Mais surtout, c'est la douce bizarrerie et la gentillesse de l'ensemble qui rendent l'aventure si inoubliable. Les ennemis ne sont que des humains et animaux manipulés par une entité maléfique : une fois battus, ils retournent à l'état sauvage ou bien redeviennent normaux, on n'est pas là pour exterminer la faune locale. Les paysages respirent la tranquillité bucolique, les PNJ sont pour la plupart amicaux et gentiment étranges. Et persiste, tout au long de cette aventure, l'impression d'être un gamin parti à l'aventure avec une bande d'amis, et on se rend compte que ça vaut bien l'impression d'être un héros parti sauver le monde (ce qu'est aussi, finalement, Ness).
Difficile donc de contenir son émotion à la fin du jeu, après un combat final plus que mémorable, quand on peut reparcourir les environnements du jeu et parler avec tous les personnages qui nous ont aidé (ou non) dans notre quête. Beaucoup plus qu'un jeu, Earthbound est une expérience à vivre.
Thursday, February 14, 2019
3615 Rodent : recap de l'album du soir
Une poignée d'albums planants à écouter avant de s'endormir.
L'album du soir : Scorn - Evanescence (1994)
Le chef-d’œuvre absolu de l'illbient, entre dark ambient, indus, dub et trip hop. Une atmosphère poisseuse, sombre et urbaine évoquant des intérieurs décrépits à la Silent Hill. Attention, l'abus d'écoutes nocturnes (au demeurant fort recommandé) peut conduire à des rêves très oppressants (testé et approuvé). >>> youtube
L'album du soir : Goldie - Timeless (1995)
Premier album solo d'une figure de la rave (sous le nom de Rufige Cru ou avec son groupe Metalheads), Timeless propose un drum & bass atmosphérique réparti sur deux disques et s'ouvrant avec un titre de 20 minutes. Parfait pour une escapade nocturne dans une mégalopole. >>> youtube
L'album du soir : DJ Spooky - Songs of a Dead Dreamer (1996)
Pièce emblématique de l'illbient, le premier album de DJ Spooky propose un hip hop instrumental tendant vers l'ambient dub aux atmosphères aussi planantes qu'inquiétantes. Pour ceux qui ont aimé Endtroducing de DJ Shadow et veulent quelque chose d'encore plus vaporeux. >>> youtube
L'album du soir : Meat Beat Manifesto - Subliminal Sandwich (1996)
Double album monstre de 28 pistes pour 2h17 de musique, le chef-d’œuvre de Jack Dangers se partage en deux disques différents. Le premier poursuit le breakbeat de 99% et Satyricon, mêlant hip hop, indus et dub, dans un style moins rentre-dedans et plus atmosphérique. Sur le second disque (instrumental), cette recette évolue en illbient à la Scorn et Techno Animal pour des ambiances psychédéliques de moins en moins groovy et de plus en plus planantes. >>> youtube
L'album du soir : Christoph da Babalon - If You're Into It, I'm Out of It (1997)
Si on pensait un jour écouter un disque sorti sur Digital Hardcore s'ouvrant sur un morceau de 15 minutes de dark ambient... C'est pourtant le cas avec cet album mêlant drum & bass atmosphérique et breakcore à la violence camouflée. Un voyage sombre mais apaisant. >>> youtube
L'album du soir : Biosphere - Substrata (1997)
Bien loin de ses précédents travaux ambient house & techno, ce troisième album du Norvégien est un pur disque d'ambient électronique qui nous emmène dans les étendues glaciales arctiques. Fait naître un sentiment d'isolation légèrement inquiétant, mais surtout incroyablement apaisant. >>> youtube
L'album du soir : Coil - Musick to Play in the Dark (1999)
Après une décennie à expérimenter avec l'électronique, l'ambient et le glitch, le légendaire groupe anglais signe un de ses chefs-d'oeuvre et une pièce maîtresse de musique expérimentale et planante. Entre un hommage à la Berlin School et le spoken word de John Balance sur des compositions minimalistes, parfois jazzy, parfois industrielles, chaque titre est fascinant et propose une expérience auditive inédite. >>> youtube
L'album du soir : Scorn - Evanescence (1994)
Le chef-d’œuvre absolu de l'illbient, entre dark ambient, indus, dub et trip hop. Une atmosphère poisseuse, sombre et urbaine évoquant des intérieurs décrépits à la Silent Hill. Attention, l'abus d'écoutes nocturnes (au demeurant fort recommandé) peut conduire à des rêves très oppressants (testé et approuvé). >>> youtube
L'album du soir : Goldie - Timeless (1995)
Premier album solo d'une figure de la rave (sous le nom de Rufige Cru ou avec son groupe Metalheads), Timeless propose un drum & bass atmosphérique réparti sur deux disques et s'ouvrant avec un titre de 20 minutes. Parfait pour une escapade nocturne dans une mégalopole. >>> youtube
L'album du soir : DJ Spooky - Songs of a Dead Dreamer (1996)
Pièce emblématique de l'illbient, le premier album de DJ Spooky propose un hip hop instrumental tendant vers l'ambient dub aux atmosphères aussi planantes qu'inquiétantes. Pour ceux qui ont aimé Endtroducing de DJ Shadow et veulent quelque chose d'encore plus vaporeux. >>> youtube
L'album du soir : Meat Beat Manifesto - Subliminal Sandwich (1996)
Double album monstre de 28 pistes pour 2h17 de musique, le chef-d’œuvre de Jack Dangers se partage en deux disques différents. Le premier poursuit le breakbeat de 99% et Satyricon, mêlant hip hop, indus et dub, dans un style moins rentre-dedans et plus atmosphérique. Sur le second disque (instrumental), cette recette évolue en illbient à la Scorn et Techno Animal pour des ambiances psychédéliques de moins en moins groovy et de plus en plus planantes. >>> youtube
L'album du soir : Christoph da Babalon - If You're Into It, I'm Out of It (1997)
Si on pensait un jour écouter un disque sorti sur Digital Hardcore s'ouvrant sur un morceau de 15 minutes de dark ambient... C'est pourtant le cas avec cet album mêlant drum & bass atmosphérique et breakcore à la violence camouflée. Un voyage sombre mais apaisant. >>> youtube
L'album du soir : Biosphere - Substrata (1997)
Bien loin de ses précédents travaux ambient house & techno, ce troisième album du Norvégien est un pur disque d'ambient électronique qui nous emmène dans les étendues glaciales arctiques. Fait naître un sentiment d'isolation légèrement inquiétant, mais surtout incroyablement apaisant. >>> youtube
L'album du soir : Coil - Musick to Play in the Dark (1999)
Après une décennie à expérimenter avec l'électronique, l'ambient et le glitch, le légendaire groupe anglais signe un de ses chefs-d'oeuvre et une pièce maîtresse de musique expérimentale et planante. Entre un hommage à la Berlin School et le spoken word de John Balance sur des compositions minimalistes, parfois jazzy, parfois industrielles, chaque titre est fascinant et propose une expérience auditive inédite. >>> youtube
Thursday, January 31, 2019
Batman - The Cult
Publiée en 1988 en quatre épisodes, cette série de Batman ne payait pas forcément de mine de prime abord, dans son recueil de 1991 au papier de médiocre qualité et aux dessins et couleurs plutôt à l'ancienne qui me rappellent cette pile de vieux Pif Gadget et autres Rahan trouvée un jour dans un placard de l'appartement où j'allais en vacances l'été.
Pourtant, le scénario est complètement dingue et offre certainement une des histoires les plus mémorables de l'univers de Batman. Ce dernier y est aux prises avec le Deacon Blackfire, un gourou charismatique qui prend peu à peu le contrôle de Gotham City grâce à son armée de clochards. Mais le scénariste Jim Starlin n'a vraiment pas eu peur d'aller au bout du truc, et rien n'a été édulcoré - le nombre de morts finit par grimper très haut.
Le mythe de Batman en prend aussi pour son grade. Pas de la même manière ni aussi efficacement que dans les versions de Frank Miller, mais il est tout de même brisé par son ennemi, temporairement enrôlé dans son armée, et en permanence en proie à des hallucinations cauchemardesques : il imagine son corps fondre comme rongé par l'acide ou voit les cadavres de ses parents lui faire des reproches.
La palette de couleurs est elle aussi assez marquante, assez fantasmagorique et psychédélique, pour accompagner ces visions angoissantes ou le chaos total dans lequel est plongé Gotham City. Une partie du scénario a d'ailleurs été repris pour le troisième Batman de Christopher Nolan, The Dark Knight Rises, remplaçant grosso modo Blackfire par Bane.
Une série très intéressante et assez captivante donc, mais à mon avis imparfaite sur certains points : Batman y apparaît trop comme une chiffe molle là où on aurait voulu le voir plus torturé qu'abattu, et si son look traditionnel passe encore, Robin et son costume à la noix donnent vraiment un coup de vieux à la fin de l'histoire. Avec un style graphique à la The Long Halloween, The Cult aurait certainement pu entrer en tête de mon top Batman.
Pourtant, le scénario est complètement dingue et offre certainement une des histoires les plus mémorables de l'univers de Batman. Ce dernier y est aux prises avec le Deacon Blackfire, un gourou charismatique qui prend peu à peu le contrôle de Gotham City grâce à son armée de clochards. Mais le scénariste Jim Starlin n'a vraiment pas eu peur d'aller au bout du truc, et rien n'a été édulcoré - le nombre de morts finit par grimper très haut.
Le mythe de Batman en prend aussi pour son grade. Pas de la même manière ni aussi efficacement que dans les versions de Frank Miller, mais il est tout de même brisé par son ennemi, temporairement enrôlé dans son armée, et en permanence en proie à des hallucinations cauchemardesques : il imagine son corps fondre comme rongé par l'acide ou voit les cadavres de ses parents lui faire des reproches.
La palette de couleurs est elle aussi assez marquante, assez fantasmagorique et psychédélique, pour accompagner ces visions angoissantes ou le chaos total dans lequel est plongé Gotham City. Une partie du scénario a d'ailleurs été repris pour le troisième Batman de Christopher Nolan, The Dark Knight Rises, remplaçant grosso modo Blackfire par Bane.
Une série très intéressante et assez captivante donc, mais à mon avis imparfaite sur certains points : Batman y apparaît trop comme une chiffe molle là où on aurait voulu le voir plus torturé qu'abattu, et si son look traditionnel passe encore, Robin et son costume à la noix donnent vraiment un coup de vieux à la fin de l'histoire. Avec un style graphique à la The Long Halloween, The Cult aurait certainement pu entrer en tête de mon top Batman.
Tuesday, January 29, 2019
De Chicago à Detroit : naissance de la house et de la techno
Frankie Knuckles est donc le parrain de la house. La house tire son nom du club Warehouse de Chicago, ouvert entre 1977 et 1983. Un repaire pour Noirs homos où Frankie Knuckles officia comme DJ, passant disco, soul, rock et musique synthétique européenne, mixture qui finira par codifier la house. Cette compilation intitulée Frankie Knuckles Presents His Greatest Hits from Trax (11 titres, 65min) rassemble des titres datant en gros de la période 1985-87. La parenté avec la disco est évidente : c'est funky et c'est fait pour faire danser les gens.
Ce qu'on remarque surtout aujourd'hui, ce sont les vocalistes quand même
un peu ringards. Il faudra faire un certain effort pour se concentrer
sur les beats imparables et ces pianos bondissants ("Move Your Body").
Il y a aussi et surtout l'immense "Your Love"
dont la parenté est partagée avec Jamie Principle avec son synthé
extatique (vous savez, c'est ce qu'Animal Collective a samplé pour "My
Girls"). Autre moment fort : "Baby Wants to Ride",
à l'instru poisseuse rappelant presque l'EBM homoérotique d'un D.A.F.
et aux paroles plus salaces qu'un morceau de Prince (même si elles se
terminent sans transition sur une diatribe anti-Apartheid).
Plus gros morceau avec cette double compile (23 titres, 2h10) de Juan Atkins, qui lui, du côté de Detroit, a inventé la techno. Ça a commencé en 1983 avec l'album Enter de Cybotron, qui est en fait autant un album d'electro (au sens electro-funk, le genre hybride entre hip hop et musique électronique, inspiré par Kraftwerk et popularisé par Afrika Bambaataa, entre autres, exemple : "Clear"). Les deux disques sont donc partagés entre morceaux du groupe Cybotron et alias solo d'Atkins, et notamment son plus prolifique, Model 500.
La sélection couvre une époque plus étendue que celle de Frankie Knuckles (années 80 et 90), mais pourtant ça ne saute pas aux oreilles à l'écoute, ni même qu'il s'agit de projets parfois différents. On a en effet la même unité de son du début à la fin (les morceaux les plus datés d'Enter étant évacués), et ce son, c'est simplement du pur ROBOT PORN à faire passer Kraftwerk pour un groupe de polka. C'est encore plus vrai avec Model 500, dont tous les morceaux donnent l'impression de traverser une ville cyberpunk dans une décapotable, écoutez-moi ce "No UFO's" si badass.
Il s'agit probablement là des deux meilleurs documents de deux scènes et deux époques qui paraissent maintenant si lointaines, mais dont la musique reste excellente (surtout celle de Juan Atkins, celle de Frankie Knuckles restant beaucoup plus ancrée dans son temps), et dont on ne trouve aucun album à proprement parler, la musique electro restant majoritairement axée singles jusqu'au milieu des années 90.
Sunday, January 27, 2019
Cowabunga le cri - des ninjas
Les Tortues Ninja n'étaient pas exactement mon truc préféré étant gamin, mais c'était certainement un des piliers du blitzkrieg de pop culture qui m'agressait via les dessins animés à la TV et autres catalogues de jouets pour Noël quand j'avais 7-8 ans, avec les Power Rangers et Action Man. Il y avait donc d'abord la série télé avec son générique énergisant mais aux paroles difficilement compréhensibles à l'époque. Et puis surtout les jouets : j'avais par exemple une espèce de tortue dont la carapace s'ouvrait avec à l'intérieur, une espèce de QG avec ses figurines, façon Polly Pocket. Et bien sûr il y avait un de mes verres à moutarde préféré avec un beau dessin de Shredder dessus.
Moi j'avais celle du milieu.
Je me suis récemment mis en tête de remater la série, débutée en 1987. La première saison est très courte, à peine plus de cinq épisodes, et se regarde un peu d'une traite. Ça fait déjà un petit moment que je l'ai revue et je ne saurai en parler trop précisément, mais je viens à l'instant de terminer la saison 2 (plus longue, 13 épisodes, avant le tsunami de 47 épisodes de la saison 3). Et je dois avouer que malgré tous mes efforts de dévolution intellectuelle pour me remettre au niveau d'un gamin de 8 ans, j'ai eu un peu de mal.
A chaque épisode, c'est pareil, on se fait avoir. Y a le générique qui tue et motive à fond, et dès que l'épisode commence, bim, on est direct refroidi par l'animation trois fois plus médiocre. Les tortues changent de proportion à chaque plan, les décors sont affreusement vides et répétitifs, les mouvements sont grossiers. On n'est pas dans une cinématique de jeu sous licence Nintendo sur CD-i, mais y a un peu de ça quand même.
Il doit n'y avoir qu'un épisode sur dix dans lequel la putain de tresse à la con de Bebop est colorée en violet (comme son iroquois) au lieu d'être grise comme le reste de son corps.
Alors bon, ça à la rigueur pourquoi pas. Si l'action est intéressante, on peut outrepasser. Sauf que merde, les épisodes sont écrits n'importe comment. C'est en gros toujours pareil, Shredder trouve une idée à la con pour se débarrasser des tortues, mais comme il est débile, il se fait victimiser et tout tombe à l'eau. A la fin, les tortues mangent des pizzas dans les égouts. Entre temps, il se passe 36 péripéties, mais toutes tellement insignifiantes et si peu porteuses de danger qu'on les regarde d'un seul œil sans capter quoi que ce soit à la structure globale de l'épisode.
En plus de ça, il faut supporter l'accent de surfeur de Michel-Angelo et son jargon débile et les cascades cartoonesques dans lesquelles au final les tortues n'utilisent jamais vraiment leurs armes de ninjas. La série est en effet bien édulcorée par rapport au comic original (que je n'ai pas lu mais qui est censé être plus sombre et violent), ce qui n'est pas étonnant car sa raison d'être est de vendre des jouets. Ce qui ne l'a pas empêchée d'être controversée à sa sortie (dans les années 80, les ninjas c'était le comble de la violence, alors dans certains pays le titre original Teenage Mutant Ninja Turtles est devenu Teenage Mutant Hero Turtles).
C'est d'autant plus dommage que le premier film, sorti en 1990, est un très bon divertissement pour enfants, avec des costumes de tortues plutôt excellents. Ses deux suites se sont en revanche montré bien moins inspirées. Le dessin animé a continué jusqu'en 1996, avant de laisser place à The Next Mutation, reprenant les costumes des films pour une saison.
Mais passons donc sous silence le "Christmas Special" pour la TV.
D'autres adaptations ont saturé l'espace médiatique : les jeux vidéo,
avec une dizaine de titres sortis entre 1989 et 1993 sur NES, Game Boy,
Super Nes et Mega Drive. Le tout premier sur NES est resté légendaire
pour sa difficulté, mais celui qui est le plus passé à la postérité est sûrement Turtles in Time par Konami sur SNES en 1992, tout simplement un des meilleurs beat 'em all de la console, accessible, bien réalisé et très dynamique, même s'il se révèle un peu chiche sur les destinations temporelles que l'on peut visiter.
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